Ce qu’il faut savoir concernant la crise de Chypre…

Que s’est il vraiment passé à Chypre? La taxation pratiquée est elle différente de l’inflation imposée par d’autres pays?

Un système bancaire démesuré

Le Chypre, ce petit pays méditerranéen, fait présentement les manchettes mondiales en raison de la crise financière qui y sévit. Ce qui est particulier dans ce pays est que son système bancaire est très gros comparativement à la taille de l’économie et qu’environ la moitié des dépôts sont détenus par des étrangers, dont une bonne part proviennent de riches citoyens Russes. Pour éviter l’implosion de son économie, le gouvernement a décidé de tenter de sauver les banques, chose que l’on peut d’ores et déjà critiquer. Cependant, vu la taille du système bancaire, impossible pour l’État de financer un tel sauvetage.

 

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Qu’est ce qui attire tant à Chypre?

Pourquoi le Chypre, qui fait partie de l’Union Européenne depuis 2004 et de la zone euro depuis janvier 2008, attire tant de dépôts? Parce que son taux d’imposition est très bas, qu’il a conclut des ententes fiscales avec de nombreux pays et que ses systèmes légaux et comptables sont anglais. À l’époque de l’accession à l’Euro, le pays était mené par un gouvernement communiste qui s’est mis à augmenter les dépenses de manière irresponsable. La situation fiscale du pays s’est donc fortement détériorée depuis. Par ailleurs, les banques chypriotes étaient fortement exposées aux titres obligataires grecs, lesquels ont engendré d’énormes pertes (5 milliards d’euros) suite à la restructuration des dettes de ce pays, détruisant le capital des banques chypriotes. Alors que les problèmes financiers s’intensifiaient en 2011, le gouvernement communiste a quémandé 2.5 milliards d’euros en aide auprès des Russes, ce qui est significatif vu que le PIB du Chypre n’est que de 17 milliards d’euros. Cette aide a permis d’éviter les réformes structurelles et l’austérité.

L’engrenage de la décote qui conduit à l’appel au secours

Puis, en 2012, suite à la décote de la dette du Chypre par les agences de notation de crédit, les titres obligataires chypriotes ne furent plus admissibles comme contrepartie à la Banque Centrale Européenne, qui décida de ne pas faire d’exception cette fois-ci (comme ce fut le cas avec la Grèce, l’Irlande et le Portugal). Le Chypre dû donc demander l’aide de la Troïka, qui nécessita des réductions de salaires des fonctionnaires et des privatisations d’entreprises d’État. Cependant, cette entente ne réglait pas la question de la solvabilité des banques. L’Union Européenne se mit alors à menacer le Chypre de lui couper la liquidité si on ne trouvait pas une solution, exigeant une décote les dépôts bancaires pour renflouer les banques.

C’est ce qui a mené au sauvetage de 10 milliards d’euros annoncé en mars dernier, qui consistait à taxer les dépôts bancaires de 10% pour obtenir les fonds nécessaires à recapitaliser les banques. Cette proposition a été rejetée par le parlement du Chypre. Ceci dit, elle fut qualifiée de « sans précédent » par les médias du monde entier. Vraiment? Pourtant, dans les faits, ce genre de taxation se produit jour après jour dans les pays industrialisés dotés d’une banque centrale.

 Dévaloriser les avoirs, est ce différent d’une taxation?

En 2008-2009, les pays qui ont décidé de sauver leurs banques, comme les États-Unis et le Royaume-Uni, n’ont eu qu’à créer la monnaie nécessaire à l’aide de leur banque centrale. Le Chypre ne dispose pas de cet outil car sa banque centrale, la BCE, est hors de son contrôle. Ainsi, le Chypre a décidé de dévaluer les dépôts par la taxation directe, plutôt que par l’inflation. Cette façon de faire paraît peut-être plus brutale, mais il s’agit néanmoins de la même chose!

Ainsi, la livre sterling a perdu 14% de son pouvoir d’achat depuis le sauvetage des banques de 2008-2009, alors que le dollar américain a perdu 10%. Donc, si vous disposiez de $100 dans un compte-chèque aux États-Unis en 2008, ce dépôt vaut aujourd’hui $90 en dollars de 2008. En fait, on pourrait dire que le gouvernement du Chypre aurait imposé un taux d’intérêt négatif de 10% sur les dépôts, alors qu’aux États-Unis les taux d’intérêt réels sont négatifs depuis 5 ans en raison de l’intervention massive de la Fed. Quelle est la différence entre le TARP et ce que le Chypre a tenté de faire? Ce n’est qu’une question de perception. En fait, la différence principale est que le Chypre ne visait que les déposants des banques, alors que la Federal Reserve dévalue tous les dollars américains. En ce sens, la Fed et la Bank of England ont fait pire!

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Dans la nouvelle version du “bailout” Chypriote, seuls les dépôts excédant 100,000 euros seront touchés et convertis en actions de la banque, alors que les créanciers obligataires et les actionnaires des banques seront essentiellement lessivés. C’est nettement mieux, puisque cela répartit mieux le risque entre les créanciers, les actionnaires et même les déposants, car en effet, il est risqué de déposer de grosses sommes d’argent dans une banque à réserves fractionnaires! Ceci dit, cette nouvelle entente ne règle pas les failles sous-jacentes du système bancaire. Et il y a toujours le risque de « bank run » une fois les contrôles levés et de contagion à l’extérieur du Chypre, où on pourrait assister à un exode des dépôts bancaires.

À cet égard, j’aime bien la manière de Stépĥane Montabert de décrire la situation:

Le gouvernement chypriote est dans la même impasse qu’un malfrat qui tient en joue un individu et espère que celui-ci continuera à lui obéir aveuglément même quand il n’aura plus une arme pointée sur lui. Soit l’État fait perdurer les limites de retrait pour que perdure l’illusion de stabilité, soit il les lève et tout peut alors arriver… C’est inévitable.

Conclusion

Pour bien des gens, la dévaluation de 10% des dépôts que le Chypre a tenté d’imposer était bien extraordinaire. En fait, dévaluer la monnaie pour aider les banques et aider les gouvernements à financer leurs déficits est une chose que les banques centrales du monde entier font tous les jours. Dans le cas du Chypre, qui ne contrôle pas de banque centrale, la chose doit se faire de manière « transparente », c’est-à-dire par une taxe visible, plutôt que par l’inflation moins visible. Il est incompréhensible que les médias financiers s’insurgent face à cette situation, pendant qu’ils regardent la Fed créer des milliards de dollars sans broncher. Cela démontre bien à quel point le système bancaire contemporain est mal compris par les gens et les médias.

En passant, regardez l’impact qu’a eu la crise du Chypre sur la valeur d’un Bitcoin :

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Le Minarchiste 

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