Le fisc veut redresser Microsoft

Allons y gaiement, après s’être payé Google, Amazon, e-bay, Facebook, Yahoo, les contrôleurs du fisc français inscrivent Microsoft à leur tableau de chasse.

Les sommes récupérées suffiront elles à payer les chômeurs qu’elles auront créés?

52,5 millions d’euros, rien que ça!

Selon BFMTV, la notification présentée s’élèverait à 52,5 millions d’euros. Le redressement découle d’un contrôle fiscal effectué en 2010. Bercy conteste les prix de transfert entre Microsoft France et la maison mère entre 2007 et 2009. Le fisc « estime » que le niveau des commissions versées à la filiale française par Microsoft Ireland est trop bas, ce qui a pour effet de diminuer les revenus déclarés en France. Le fisc reproche en outre à Microsoft France d’avoir un rôle commercial, ce qui est incompatible avec le statut d’agent commissionné. C’est pour obtenir des preuves sur ce dernier aspect du contrôle que le fisc avait perquisitionné les bureaux du siège à Issy-les-Moulineaux, en juin dernier.
BFMTV précise que Microsoft « conteste ce redressement, et a saisi la Commission nationale des impôts directs« . La société indique par ailleurs que le fisc lui remboursera un trop-perçu au titre d’un autre exercice fiscal.
Microsoft France a déjà subi, toujours selon BFMTV, un redressement de 355 540 euros sur la période 2000-2001, et de 1,1 million d’euros sur la période 2002-2004, des sommes tout de même plus « raisonnables ».

Quand viendrons nous à la sagesse?

Tout d’abord, sur le plan strictement légal, rien n’interdit, surtout dans l’espace européen, d’avoir une maison mère vers laquelle la filiale française fait remonter, via des royalties par exemple, ses bénéfices. Pourquoi les société américaines procèdent elles de la sorte? Parce que les taux d’imposition en France sont plus importants qu’ailleurs. Et que dans ce cas, il est logique, normal, qu’une société cherche à payer ses impôts au meilleur tarif. Quand certains ministres se gaussent des investissements étrangers en France, ils oublient de préciser que c’est parce qu’elles procèdent de la sorte, qu’elles acceptent encore de s’installer en France. Croyez vous que Disneyland se serait installé en France, avec le trafic touristique qu’il génère, si le fisc l’empêchait de faire remonter sur sa maison mère des royalties ahurissants qui lui permettent de se déclarer en perte tous les ans ou presque? Croyez vous que tous ceux cités plus haut et que le fisc français semble vouloir aligner seraient installés en France s’ils n’avaient la possibilité légale d’échapper au racket fiscal pratiqué par l’Etat? Selon la bonne vieille « courbe de Laffer« , les Etats moins gourmands que la France encaissent finalement plus de recettes fiscales.

Faut il céder au chantage?

Est ce à dire qu’il faut « céder au chantage » et préférer voir un ministre de la république inaugurer un dépôt Amazon plutôt que d’insulter un chef d’entreprise étranger qui licencie du personnel sur le territoire national? Malheureusement, on n’attire pas les mouches avec du vinaigre et les investisseurs étrangers avec des redressements fiscaux de 52M€! Il y a un moment où il va bien falloir arrêter les postures idéologiques et opter pour des décisions pragmatiques.

Pour ma part, et je reprends volontairement les termes de certains socialistes, je plaide pour une normalisation européenne de la fiscalité. Pourquoi? Parce que la France est une anomalie dans le pays fiscal européen. Un furoncle, une tumeur. S’il y avait normalisation, cela ne pourrait se faire que par une baisse considérable de la pression fiscale française. C’est uniquement de cette manière, par la baisse de la pression fiscale française, que nous arriverons à normaliser la situation et à générer de nouveaux investissements, donc de nouvelles activités, donc de nouvelles recettes fiscales pour l’Etat. Une attitude consistant à fermer les yeux sur les transferts à l’étranger, même par des moyens comptables légaux, de bénéfices générés en France ne serait pas satisfaisante. Pas satisfaisante, car elle continuerait d’handicaper les entreprises françaises par rapport à leurs concurrentes étrangères. En effet, à moins de créer fictivement des sociétés étrangères auxquelles elles régleraient des factures ou à transférer dans d’autres pays les sièges sociaux d’un certain nombre de leurs activités (L’Oréal…), les sociétés françaises se trouvent à subir, pour leurs activités sur le territoire national, une fiscalité plus importante que les sociétés étrangères créant des filiales françaises. Un comble, non? Et encore, je ne parle pas des Qataris pour qui la France est véritable paradis fiscal, puisqu’ils y sont exonérés de tout….

Un soupçon de bon sens, est-ce trop demander?

Plutôt que de maintenir une fiscalité confiscatoire que l’on cherche à imposer aux étrangers au risque de les faire fuir après avoir enclencher la fuite de nos propres forces créatrices, plutôt que d’instaurer un système dérogatoire qui devient toujours une de ces usines à gaz dont nos énarques ont le secret, il serait préférable, dans le cadre du « redressement productif » d’instaurer une fiscalité qui inciterait les entreprises étrangères à payer leurs impôts en France, qui mettrait les entreprises françaises sur un pied d’égalité avec leurs concurrentes et qui relancerait l’activité par l’investissement sur notre territoire. Tout cela semble tellement évident, tout cela procède d’un tel bon sens qu’on en oublierait presque que nos élus, à quelques exceptions près, n’ont de formation économique que le pitoyable niveau que leur sert l’éducation nationale.

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5 comments

  • le raisonnement que vous nous exprimez comporte deux failles qu’il faut examiner et sur lesquelle il faut tranhcher :

    1) doit on abandonner la souveraineté nationale qui s’exprime par la fiscalité, en acceptant les règles de etrangères, au nom d’une homogeneité qui cache l’ensemble d’un systeme de redistribution?

    2) doit on considerer l’entreprise comme un predateur sur un tissus socio-economique ou comme un acteur de ce même tissu?

    Gerer l’equilibre est un jeu complexe et vous ne pouvez pas dire qu’il est necessaire d’abdiquer sur des questions de rapport de forces.
    MS (ou n’importe quelle multinationale) doit respecter les regles du pays dans lequel elle agit.
    On sait tres bien comment cela se passe, on crée un siege dans un paradis fiscal, on cede des licenses a ses filliales et toute la valeur ajoutée et marge est sucée par le siege, donc les impots qui en decouleraient.

    C’est inacceptable, car si l’on accepte, c’est tout l’edifice socio economique qui s’effondre au profit unique de quelques uns, recreant ainsi une jungle et niant l’intelligence de la sociéte humaine.

    Si on comprend bien qu’un systeme ouvert est toujours preferable a un systeme contraint, on sous entend quand même que les petits comme les gros, adherent a la philosophie globale du systeme.

    Or, ce n’est pas le cas.
    L’optimisation fiscale est un acte de delinquance economique, qui entraine par reaction des hausses d’impots que ce soit par l’assiete ou les taux.
    La suppression des droits de douanes, qui etaient un outil de regulation est une erreur car il permettait un ajustement economique entre les zones economiques.

    La position de MS ou des autres est indefendable et s’il y a une homogeneité a creer, ce n’est pas par les taux d’imposition qui sont un outil economique local, mais par la regulation des licences, de la filialisation et probablement du rapport activité/rendement/secteur-economique… et j’en oublie surement d’autres

    On peut etre liberal, mais pas imbecile. Autant l’exces d’impot est insupportable surtout quand il est confiscatoire que le « laxisme du marché » est inacceptable pour les communautés socio-economiques qui ont le droit et le devoir de defendre leurs choix.

    • « on sous entend quand même que les petits comme les gros, adherent a la philosophie globale du systeme »

      Là est le coeur du problème, on ne part pas d’un système auquel on puisse adhérer intellectuellement et où il serait parfaitement légitime de condamner Microsoft, dont il n’y a guère de doute qu’il se comporterait pareillement en voyou. On part d’un système où il faut avoir abandonné tout bon sens pour approuver les règles, simplement même pour ne pas privilégier la survie à la confiscation. Le droit pour les défenseurs de ce système de défendre leur choix ne peut se transformer en droit à les imposer, quand bien même ce serait aux pires criminels.
      Ce choix de l’imposition confiscatoire est une insulte non seulement aux droits des cibles (et je veux bien admettre que certains pensent que les cibles criminelles n’ont aucun droit), mais surtout à l’intelligence la plus élémentaire parce que, pragmatiquement, les conséquences immédiates de la confiscation sont néfastes pour le confiscateur.

      L’article ne propose pas de donner carte blanche aux tricheurs, il suggère d’établir des règles du jeu acceptables par tous et bénéficiaires à tous. Quand on n’est le plus fort que dans son petit jardin, c’est quand même plus sensé que de se dresser sur sa cloche à melons contre le monde entier parce qu’il se refuse à adopter nos règles autocratiques.

    • Bonjour Hélios,

      Tout d’abord, rassurez moi, le terme « imbécile » vous a échappé, non?

      Ensuite, concernant vos deux questions:
      1)Je suis contre l’abandon de la souveraineté nationale. Bien sûr que la maîtrise de la fiscalité est capitale pour l’exercice de cette souveraineté. Si je fais appel, dans cet article à « l’harmonisation européenne » c’est pour montrer la bêtise et l’incohérence de ceux qui nous gouvernent et qui font de notre pays une exception fiscale sans pareil au monde et, en même temps, viennent demander une « harmonisation » dès que la liberté s’exerce de ne pas accepter leur régime coercitif et confiscatoire. Les jeunes Français émigrent au sortir des grandes écoles? Les créateurs d’entreprises d’installent à l’étranger pour avoir une chance de ne pas pointer au RSA dans quatre ans? Nos grandes fortunes émigrent pour ne pas devenir simplement aisés? Nos aisés émigrent ou trichent pour ne pas devenir « classe moyenne »? Les entreprises étrangères acceptent d’investir en France à condition d’échapper au régime qui empêche les Français de le faire? A chaque fois, nos dirigeants crient à « l’harmonisation fiscale ». Sauf que si cette harmonisation existait, les prélèvements, taxes, impôts en tous genres que nous subissons en France seraient réduits de moitié. Et alors, que se passerait il? Nos fortunes ne partiraient plus, nos entrepreneurs créeraient, etc etc..
      2)Je ne comprends pas votre question. Seuls les marxistes les plus obtus (souvent ceux qui n’ont pas lu leur idole) peuvent encore considérer une entreprise comme un prédateur. C’est justement pour cela qu’il convient de tenir compte de l’ensemble des paramètres. Expliquez moi, cher Hélios, pourquoi des étrangers viennent investir en France et que les Français préfèrent investir à l’étranger? Parce que la société cosmopolite et libre échangiste est en marche? Pas du tout. Ca, c’est du charabia pour benêts. La réalité est beaucoup plus pragmatique. Parce que le marché français est toujours intéressant (même si c’est de moins en moins vrai), car, je vais en faire bondir certains, le niveau de vie « de masse » en France demeure très élevé, probablement le plus élevé du monde (des catégories entières de la population comme les non qualifiés, les chômeurs indemnisés, les retraités, les fonctionnaires ont en France le plus haut niveau de vie du monde). Nous avons les classes laborieuses qui ont le plus haut niveau de vie. Cela attire les entreprises du mass market. Mais voilà, nous avons aussi la fiscalité la plus confiscatoire (cela va avec car c’est l’interventionnisme de l’Etat qui maintient artificiellement le niveau de vie). S’installer en France en subissant intégralement le coût de la fiscalité rendrait l’opération peut ou pas intéressante. C’est ce qui explique le peu d’intérêt des entreprises françaises à investir dans notre pays. Pire, c’est qui explique les délocalisations. Voire, pour certaines, c’est ce qui explique l’existence de sociétés « écran » qui s’occupent de faire fabriquer dans divers pays du monde pour revendre ensuite à la société française (cf certaines chaînes de parfums…). Il est clair que cela est beaucoup plus facile pour des société étrangères, puisque le lien avec des entités hors territoire français existent.
      La surfiscalité est donc génératrice de pertes d’emplois en France, génératrice de distorsions de compétitivité entres investisseurs français et étrangers en faveur de ces derniers, génératrice de fuite d’investisseurs vers d’autres pays que la France. Traiter les entreprises de prédateurs ne résout rien. Créer un contexte qui devienne favorable à des relations gagnant-gagnant serait beaucoup plus intelligent.
      Je raconte souvent cette anecdote: J’étais de passage en Italie dans les années 70, chez un ami qui avait une petite fabrique de brosses. Un jour où j’étais là, le contrôleur de l’équivalent de notre URSSAF passe à l’entreprise. Tutoiement, petit verre, discussion, au bout d’un moment le contrôleur dit à mon ami, « Allons, je sais que tu as plus de quinze personnes qui travaillent, tu m’en déclares cinq pour ce mois-ci, d’accord? » Pragmatisme qui a fait que l’Italie dont on disait à l’époque qu’elle n’avait plus d’économie s’est retrouvée quelques années après au G7… Il est des fois où effectivement, il faut être pragmatique et regarder quel est l’intérêt supérieur. Créer de l’activité, des emplois, c’est soulager la collectivité d’un poids (celui de la compensation sociale), c’est générer des recettes, c’est créer une dynamique. Le dogmatisme empêche cela.

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