Ayrault, le savonneur de planches….

A défaut de construire, le premier ministre excelle dans l’art de démolir ce que fait le Président….

La semaine écoulée s’est nourrie de l’illusion d’un Conseil des dépenses publiques. Annoncé par le 14 janvier il s’est réuni autour du chef de l’État le 23. Sans doute a-t-on jugé en haut lieu qu’il fallait encore créer de nouvelles instances de concertation, puisque les institutions supposées compétentes ont échoué.

Le président a déjà perdu deux ans sur la perspective de « l’inversion de la courbe du chômage ». Sa crédibilité de réformateur se révèle plus qu’entamée. L’enlisement de ce qui lui reste ne peut aboutir qu’à une catastrophe institutionnelle.

L’entretien avec Jean-Marc Ayrault, publié par « Le Monde » soulève pourtant à cet égard un certain nombre de problèmes.

Les gros moyens de la désinformation quotidienne tendaient ces derniers temps à passer le personnage, et sa fonction constitutionnelle, à la trappe. Au moins ce texte, médiocre à tous égards, nous rappelle que le Premier ministre existe puisqu’on l’a vu à la télé.

On doit tout d’abord évoquer, fût-ce rapidement, l’équation personnelle du chef actuel du gouvernement.

Avec son faux air de majordome pour comédie de boulevard, il ne lui manquait que le costume pour jouer parfaitement son rôle quand il présidait le groupe socialiste à l’Assemblée nationale. Choisi pour sa fidélité par un François Hollande, fraîchement élu mais de longtemps ambitieux de grimper au sommet du cursus républicain, il atteignit très vite son seuil d’incompétence.

Aujourd’hui son propos, flou et mou, ne sert plus qu’à souligner les funestes ambiguïtés de la voix de son maître.

Prenons un premier exemple. Le texte du Monde, journal papier imprimé le vendredi 24, est daté, comme d’habitude des samedi 25- dimanche 26 janvier. Or, notre Ayrault a rencontré les journalistes le jeudi 23, comme en atteste la date de la photo publiée par le fameux « grand quotidien du soir ». Lues attentivement ses déclarations ne démentent certes pas, en elles-mêmes, le contenu, déjà fort problématique, du président de la république. Le creux ne contredit pas le vague.

Il se trouve que l’on pouvait lire dans « L’Humanité » du 23 janvier un texte assez menaçant. Il doit être considéré comme de conception purement cégétiste. Cette adresse a été, cependant, signée en commun des principales confédérations syndicales de la fonction publiques : CFDT, CFTC, CFE-CGC, CGT, FA-FPT, FSU, Solidaires, Unsa s’alignent en effet pour proclamer que « les fonctionnaires ne veulent pas être victimes des 50 milliards d’austérité »« Leur inquiétude, ajoute L’Huma, est d’autant plus vive que le premier ministre a estimé ce jeudi que l’objectif était de réaliser ‘au minimum 50 milliards d’économies’ d’ici à la fin du quinquennat, en 2017. »

Inutile, évidemment de souligner que ces prétendus « 50 milliards » ressemblent à tous les chiffres avancés par le gouvernement, résultats d’additions virtuelles de quantités hypothétiques regroupant, comme trop souvent, les carottes et les navets.

Dans un tel contexte accusatoire, se situant lui-même sur la défensive, le Premier ministre a cru intelligent de chercher à rassurer. Il s’adresse à des journalistes qu’il suppose partager les visions cégétistes. En se rapportant au texte même de l’entretien on se rend compte qu’il n’a rien fait d’autre que d’ergoter pour expliquer que sa politique s’inscrivait dans un plan d’ensemble qu’il croit de haute tenue et de grande envergure.

On remarquera qu’il se prépare à commettre les mêmes erreurs que le plan Juppé-Barrot de 1995-1996. Il croit « faire des économies » en « mutualisant les caisses sociales », au lieu de les mettre en concurrence. Mais « qu’attendre d’un cochon sinon un grognement » dit le proverbe anglais. Qu’attendre dons d’un politicien socialiste conseillé par des technocrates français ? Mais lorsqu’un cavalier ne maîtrise pas sa monture, celle-ci n’en fait qu’à sa guise.

Et voici comment ses déclarations se retrouvent déformées par une dépêche de l’agence Reuters. Or celle-ci est beaucoup plus largement diffusée que le quotidien dont est issue la déclaration.

Le titre dit tout : « Jean-Marc Ayrault jure que la politique du rabot est terminée ». En fait Ayrault ne « jure » de rien, rien n’est terminé car rien n’est même commencé. Ayrault sabote seulement, par sa propre maladresse et ses incertitudes les annonces déjà peu crédibles de Hollande.

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